L’animateur et journaliste Guy Mongrain s’est retiré des écrans de télévision il y a presque cinq ans. Mais l’héritage qu’il a laissé dans le paysage médiatique québécois en 41 ans de précieux services demeure, et sa jovialité et sa verve seront toujours associées au plaisir et à la bonne humeur, malgré la rigueur et la réflexion qui n’ont jamais cessé de teinter ses observations et ses actions.

À l’occasion de ce numéro consacré à l’amour et à la famille, le retraité, manifestement heureux, s’ouvre sur sa relation avec sa conjointe, Gabrielle, avec qui il partage sa vie depuis 45 ans, sur son statut de grand-papa constamment émerveillé et sur la bienveillance et le bonheur qu’il tente bien humblement de répandre sur Twitter pour contrebalancer la hargne qui gangrène les réseaux sociaux et frappe les médias.

Un couple qui dure

Avec une grande générosité, Guy Mongrain accepte de parler de son couple, qui semble avoir duré d’une façon tout à fait naturelle : « On s’est rencontrés fin janvier en 78. Au départ, bien on a essayé [d’être ensemble], comme tout le monde, puis année après année, ça a fonctionné, ça a comme marché. » L’homme attribue la longévité de sa relation avec sa compagne à leur aversion pour les disputes et la colère – le couple privilégie les discussions calmes –, mais surtout au respect de l’autre et de ses désirs : « [Il faut] se laisser beaucoup de liberté aussi. On n’est pas des emprisonneux. Ma blonde, à un moment donné, a dit “Je m’en vais faire Compostelle”, alors je lui ai répondu “Fais attention à toi, et tâche de revenir avec tous tes morceaux.” C’est comme ça, on n’est pas menottés. Ça, c’est très, très important. Elle a une vie, et moi aussi, et on se complète là-dessus. » Guy et Gabrielle partagent cependant depuis des lustres une passion, celle du voyage, qui les unit à travers l’exploration et l’émerveillement :

”Quand on voyage ensemble, autant en véhicule
récréatif qu’en voyages intercontinentaux, on est
de bons partenaires de voyage. On se complète
merveilleusement bien parce qu’on a les mêmes
aspirations de voir, de découvrir des choses, puis
de profiter des chances et des privilèges qu’on a.
Là-dessus, on est toujours sur la même longueur”

C’est d’ailleurs à l’occasion d’un voyage que Guy Mongrain a offert à sa douce une surprise romantique, qu’il raconte comme une petite folie faite au nom de l’amour. À l’époque où il animait Fort Boyard, il avait organisé une escapade en Bretagne et en Normandie et dit à sa femme « Je t’emmène quelque part, et je ne te dis pas où ». Les amoureux ont alors abouti à Giverny, pour visiter la maison et les jardins de Monet. Pour ces grands admirateurs des impressionnistes, « ça avait été une visite extraordinaire ».

La plus belle job au monde

À l’évocation de ses deux petites-filles et de sa relation avec elles, le regard de Guy Mongrain s’illumine : « C’est la plus belle job au monde!, lance-t-il, avant même qu’une question soit formulée. Quand ça fait longtemps que je ne les ai pas vues, je tape du pied, je m’en ennuie. » Celui que les deux fillettes de 11 et 7 ans appellent Papou avoue sans gêne être un grand-papa gâteau, inspiré par son beau-père : « C’est un passage obligé. Je tiens du père de ma blonde qui, lui, savait qu’une portion de crème glacée, ça remplit un bol à soupe », raconte-t-il en riant de bon cœur. Alors, oui, il les gâte. Avec des crêpes, au chalet, commandées du balcon d’une mezzanine rebaptisée le château des princesses. Avec des recettes préparées avec elles contenant des canneberges séchées, une gourmandise qu’elles aiment beaucoup.

Avec toutes sortes de jeux et des niaiseries, dont Guy Mongrain s’autoproclame coach attitré : « J’ai appris à mes deux petites-filles que le pâté chinois, c’était italien », explique-t-il, récitant la recette du pâté chinois avec un fort accent italien et une gestuelle caricaturale qui n’ont qu’un but : faire rire les principales intéressées.

Mais au-delà du plaisir que lui procure la proximité de ses petites-filles, Papou espère devenir pour elles, avec le temps, une référence. La plus vieille, qui approche de l’adolescence, lui rappelle à quel point les grands-parents peuvent soutenir les jeunes personnes qui se distancient forcément de leurs parents : «J’ai vu des exemples, dans mon entourage, de grands-parents qui ont eu ce genre d’engagement là, de temps, avec leurs petits enfants, et qui est resté. Comme un repère neutre. Comme la Suisse vis-à-vis un conflit. On n’est pas là pour juger. Dans la vie des parents, il y a la phase compréhension, puis la phase discipline. Quand tu es grand-parent, tu as juste une colonne, juste la compréhension, et tu as du temps.»

En pensant à ses petites-filles, Guy Mongrain formule un souhait qui lui est cher : « J’espère vivre assez longtemps pour les voir arriver à l’âge adulte, début vingtaine. Je veux voir cette progression-là. Si je devais quitter la Terre avant ce bout-là, je serais un peu déçu. On va essayer! », s’exclame-t-il dans un éclat de rire. À constater la grande forme du monsieur, on serait étonné qu’il n’y arrive pas.

Une présence bienveillante sur Twitter


Guy Mongrain se montre d’emblée étonné de l’attention qu’il reçoit en raison de son compte Twitter : «On dirait que c’est devenu un sujet incontournable. Tout le monde me parle de ça! » Mais pour peu qu’on soit familier avec le réseau social, il est possible de percevoir de quelle façon les interventions de l’ex-journaliste sont de celles qui participent à l’allègement et à l’assainissement du média.

On trouve sur le fil Twitter de Guy Mongrain des calembours, bien entendu, mais également des microtémoignages de moments de bonheur, des suggestions musicales, des réflexions ininflammables sur le sport et l’actualité, des blagues inoffensives… « C’est du divertissement. Quand je n’ai rien à dire, je ne dis rien », assure celui qui est devenu, avec ses petits gazouillis sans prétention, une figure de
bienveillance sur la plateforme : « Quand c’est bien senti, quand c’est vrai, je suis un fier partisan de la bienveillance. Puis je n’arrêterai pas. C’est pour faire contrepoids à tout ce qui est hargneux, à tout ce qui est chialeux, à tout ce qui est amer, toxique. C’est ma petite contribution. »

Guy Mongrain avoue qu’à ses débuts sur les médias sociaux, il lui est arrivé de tenter de discuter avec des gens « qui cherchaient des bibites », et qu’il a même eu une période antiTrump : « J’ai fait des essais et des erreurs. J’ai ensuite raffiné mon truc, quoique même le gazouillis le plus inoffensif va susciter des réactions. » Aujourd’hui, il n’hésite pas à bloquer et à masquer les indésirables – « les négationnistes de la science, les pissous anonymes, qui sont à côté de la track » – qui s’aventurent dans son environnement virtuel.

Mais quels sont donc, de son côté, les comptes Twitter qui lui font du bien?

Pour l’ex-animateur, les comptes de photographie remportent la palme : « Les publications de photos, ça me jette à terre. Il y a Lawrence Desrosiers qui est un gars de la Côte-Nord, il y a Mark Gray de Terre-Neuve, parce que je suis allé à Terre-Neuve, et je capote sur Terre-Neuve. Les photographes, ceux qui publient du beau, de l’intéressant, ça vient me chercher. »

Puis, il y a Ken Heldevo, un camionneur transcontinental qui alimente qui emmène ses abonnés avec lui sur la route et qui ponctue ses publications de réflexions diverses et de faits intéressants : « J’aime les gens qui ne se prennent pas pour d’autres, qui ne se prennent pas au sérieux, qui sont capables de réfléchir, mais avec un sourire en coin. C’est ce que je fais d’ailleurs. Des fois, ça peut paraître insignifiant, mais il y a aussi un petit moment de réflexion à faire avec ça. Et je pense que la façon légère de le faire, comme moi, puisque c’est ma nature, ça fait réfléchir un petit peu. Pas pour se prendre la tête, mais juste pour voir un peu plus loin.